A l’instar des autres pays de l’Afrique Sub-saharienne, le Bénin connaît une croissance démographique rapide qui s’accompagne d’une croissance significative de la demandealimentaire. Répondre à cette demande dans un contexte de changements climatiques requiert une transformation structurale de l’agriculture par le recours à de nouvelles technologies
agricoles. De plus en plus d’études mettent en avant le potentiel du numérique à faciliter l’accès des acteurs agricoles à ces technologies agricoles, et leur impact sur la productivité agricole. Dès lors l’émergence des solutions numériques est une opportunité pour améliorer la productivité
agricole et pour renforcer l’adaptation aux changements climatiques dans le secteur agricole. Cette opportunité trouve un écho favorable dans les nouvelles orientations politiques du Bénin qui font du numérique un levier de la croissance économique et de l’inclusion sociale. La présente étude a établi le profil de l’agriculture numérique et de l’adaptation aux changements climatiques au Bénin. Ce profil permet d’apprécier l’état de préparation du Bénin à la transformation numérique de l’agriculture et de l’adaptation aux changements climatiques. Le profil de l’agriculture numérique et de l’adaptation aux changements climatiques au Bénin est décrit suivant six volets que sont :
Contexte de l’agriculture au Bénin
Au Bénin, le secteur agricole, qui contribue en moyenne à 27% du PIB, a connu une relance grâce à des stratégies de développement et des réformes axées sur la résilience aux changements climatiques et la sécurité alimentaire. Celles-ci ont ciblé certaines filières, visant à améliorer la
productivité, la transformation et l’accès au marché. Le secteur privé a vu son rôle renforcé dans le domaine. Le pays compte environ 926 000 ménages agricoles, avec un revenu agricole relativement bas. Les principales cultures d’exportation sont le coton, suivi des noix de cajou, du karité, du soja et de l’ananas. Au cours des deux dernières décennies, le Bénin a stimulé et relancé
son secteur agricole avec des visions périodiques et des stratégies de développement agricole, atteignant l’autosuffisance pour la plupart des cultures. Depuis 2016, des réformes ont été instaurées pour rendre l’agriculture dynamique, résiliente aux changements climatiques et pour
soutenir la sécurité alimentaire. Les nouvelles orientations agricoles ciblent certaines filières (conventionnelles, émergentes et à haute valeur ajoutée), favorisant l’amélioration de la productivité agricole, la transformation et l’accès au marché pour certaines, tout en visant la souveraineté alimentaire pour d’autres. Ces orientations ont renforcé le rôle du secteur privé dans le secteur agricole.
Le Plan Stratégique de Développement du Secteur Agricole (PSDSA 2017-2025) a identifié cinq problèmes majeurs : une faible productivité, un environnement peu propice à la structuration des chaînes de valeur, une faible résilience aux changements climatiques et à la dégradation des
terres, un faible niveau de gouvernance et des mécanismes de financement inadaptés et difficilement accessibles.
Défis climatiques et opportunités d’utilisation du numérique pour l’adaptation aux changements climatiques
Le Bénin est confronté à plusieurs risques climatiques perturbant son agriculture, incluant des précipitations tardives, violentes, des sécheresses, la chaleur excessive, les vents violents et l’élévation du niveau de la mer. Le maïs est la culture la plus vulnérable, suivi du coton, du riz, de l’anacarde et de l’élevage bovin. D’ici 2050, une diminution des précipitations de 12% et une hausse des températures moyennes de 20% sont prévues, ce qui risque d’aggraver les conditions dans les régions agricoles, diminuer les rendements et augmenter les maladies animales.
Le numérique peut aider à surmonter ces défis en renforçant l’information agro-climatique et hydrologique, en favorisant l’adoption d’innovations et de pratiques d’agriculture climato-intelligente. Il peut aussi améliorer le suivi des exploitations, faciliter l’accès au financement et à l’information sur les marchés, augmentant ainsi la résilience des agriculteurs face aux chocs
climatiques.
Environnement de facilitation de la transformation numérique de l’agriculture et de
l’adaptation aux changements climatiques
Au cours des 20 dernières années, le Bénin a lancé sa transformation numérique pour devenir un pôle de référence en Afrique de l’Ouest, utilisant le numérique pour stimuler son développement socio-économique. Ceci comprend des investissements dans les infrastructures numériques, des
réformes politiques, l’amélioration du cadre réglementaire, la sécurisation ducyberespace et la promotion de l’entrepreneuriat numérique.
Compte tenu de l’importance de l’agriculture, le Bénin a mis en place la Stratégie Nationale d’Agriculture Numérique 2022-2025 pour encourager une transition numérique inclusive et durable dans ce secteur. En parallèle, le pays a adopté une stratégie sur l’intelligence artificielle et les mégadonnées, ciblant notamment l’agriculture.
Le plan de développement agricole 2020-2024 du Bénin intègre l’adaptation aux changements climatiques, avec des actions pour promouvoir l’Agriculture Intelligente face au Climat (AIC), développer des cultures résistantes au climat, soutenir des pratiques agricoles écologiques et
diffuser des techniques adaptées aux changements climatiques. Les solutions numériques pour l’agriculture et l’adaptation aux changements climatiques au Bénin.
Au Bénin, il existe 50 solutions numériques agricoles, réparties en quatre catégories : conseil, formation et information pour les producteurs (56%), commercialisation des produits agricoles (16%), facilitation de la mise en relation entre les acteurs de la chaîne de valeur agricole (14%),
et des services de suivi des activités culturales et de cartographie des exploitations (32%). Parmi celles-ci, 54% sont sur le marché, 30% sont en phase de test, et 16% sont en cours de création.
Parmi ces solutions, 24 ont le potentiel d’aborder les problèmes liés à l’adaptation aux changements climatiques. Elles ciblent principalement le sous-secteur végétal. Seulement 25% (6 sur 24) de ces solutions sont spécifiquement conçues pour l’adaptation aux changements climatiques, les autres ayant le potentiel de contribuer à la résolution des défis climatiques.
Les défis pour la transformation numérique de l’agriculture et de l’adaptation aux
changements climatiques
Le Bénin est confronté à plusieurs défis dans la transformation numérique de l’agriculture et l’adaptation aux changements climatiques. Les problèmes principaux incluent un accès limité à Internet dans les régions rurales, une infrastructure technologique insuffisante, un taux élevé d’analphabétisme numérique, etc. De plus, il y a des défis spécifiques à l’écosystème du e-agriculture comme le manque de compétences des innovateurs numériques, le manque de financement pour la R&D, des difficultés de déploiement et d’adoption de nouvelles solutions numériques, une inadéquation des solutions numériques aux conditions et besoins locaux,
une viabilité économique dépendante de subventions, un manque de solutions abordant les changements climatiques, une fiabilité incertaine des services numériques climatiques, et une collaboration insuffisante entre les acteurs du numérique dans le secteur agricole.
Les leviers d’actions et d’investissements pour la transformation numérique de l’agriculture et de l’adaptation aux changements climatiques
Pour accélérer la transformation numérique de l’agriculture et l’adaptation aux changements climatiques au Bénin, plusieurs leviers d’action et d’investissement ont été proposés. Ces derniers incluent : l’amélioration de l’accès à Internet et à l’énergie dans les zones rurales, la protection
des agriculteurs contre les menaces cybernétiques, le renforcement des compétences numériques par l’éducation et la formation, la création d’un fonds d’investissement pour la R&D de solutions numériques adaptées à l’agriculture et aux changements climatiques, le facilitation du déploiement et de l’adoption de ces solutions, l’alphabétisation fonctionnelle et numérique des agriculteurs, le développement de solutions en fonction des besoins locaux, la formation des entrepreneurs numériques sur les enjeux des changements climatiques, l’amélioration de la qualité des données météorologiques, la mise en place d’une plateforme numérique centralisée fournissant des services climatiques, et enfin, la facilitation de la collaboration entre les acteurs du numérique.